La route Zérotracas
30 novembre 1999
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Les autres carburants

Tensions et guerres au Moyen-Orient, monarchies rétrogrades, multinationales arrogantes, effet de serre, pollution, marées noires… En un peu plus d’un siècle d’exploitation, le pétrole a généré autant de catastrophes que de progrès. Alors que le baril flirte avec les 70$, que la demande explose en Asie, que les réserves seront probablement épuisées à la fin de ce siècle et qu’il est urgent de donner de l’air à la planète, quelles sont les alternatives à l’or noir ? 

Les pouvoirs publics tentent de limiter l’utilisation de la voiture, autour de laquelle notre vie s’est organisée, mais leurs efforts pour favoriser la substitution du pétrole sont encore timides. Zérotracas.com se propose de faire le point sur les autres sources d’énergie possibles. Finalement, il s’agit aussi de prévention : celle de notre monde.
La France consomme environ 90 millions de tonnes de pétrole par an, dont plus de la moitié est dévolue au transport. Contrairement à d’autres pays (Suède, Brésil, et même les USA), elle a tardé à mettre en place une véritable politique d’alternative au pétrole. Alors que le prix de ce dernier atteint des sommets, le Gouvernement vient d’annoncer des mesures volontaristes pour pousser les biocarburants dont la production, plus coûteuse que celle du pétrole, tend à devenir économiquement viable. Ils devraient, à l’horizon 2010, représenter 10% de notre consommation. Mais au-delà, il existe bien d’autres idées qui nous feront, peut-être, rouler demain. 

Les biocarburants.

Monsieur Ford le disait il y a 100 ans : n’importe quelle huile peut faire tourner un moteur. De fait, 2000 espèces végétales peuvent donner de l’huile… et toutes sont combustibles.

Les biocarburants sont les carburants issus de la biomasse, l’ensemble des végétaux pouvant être valorisé pour produire de l’énergie. Les biocarburants ont beaucoup d’avantages : ils sont renouvelables, peuvent être produits partout et émettent beaucoup moins de gaz à effet de serre que les hydrocarbures.

Certains écologistes radicaux (ainsi que les agriculteurs qui produisent la matière première) préconisent de l’utiliser pur, ce qui est encore techniquement – et surtout fiscalement – compliqué. Les industriels, eux, développent aujourd’hui deux filières : celle de l’éthanol pour le moteur essence et celle des huiles végétales pour le diesel.

-      L’éthanol est un alcool issu des plantes sucrières ou des céréales qui se mélange à l’essence. Très répandu au Brésil et aux USA, il peut représenter jusqu’à 85% du carburant. En Europe, pour des raisons de sécurité et de performance, il est transformé en ETBE (Ethyl tertio butyl éther) et peut être dosé à 15% dans l’essence.

-      La transformation, grâce à l’ajout de méthanol, des huiles végétales (colza, tournesol, soja…) en EMHV (ester méthylique d’huile végétale) permet d’alimenter les moteurs diesels. On ajoute 5% de EMHV au diesel pour obtenir un biodiesel (dit aussi biogazole ou diester) distribué à la pompe sans identification particulière, si ce n’est publicitaire.

Au-delà de ces deux axes conduits à prendre de l’ampleur dans les années à venir, l’industrie réfléchit à d’autres formules qui n’utiliseraient pas les produits de la filière alimentaire et limiteraient la pollution secondaire (irrigation, engrais). Les travaux portent notamment sur la valorisation des résidus agricoles ou des déchets organiques. Mais de longues recherches sont encore nécessaires pour faire rouler les voitures au compost !

L’électricité.

Au début de l’automobile, il y eut bataille sur la motorisation avant que le pétrole n’emporte le morceau. Et aujourd’hui, il n’est pas rare de croiser des voitures électriques, parfaitement silencieuses, et propres. Propres ? Certes, elles n’émettent aucun gaz, mais qu’en est-il de l’électricité, produite par le nucléaire ou le pétrole ?

Cela dit, ce sont plus la faiblesse de leur autonomie et la longueur du temps de charge qui pénalisent l’essor de la voiture électrique. Elle est souvent limitée à un usage urbain, véhicule municipal ou appartenant à EDF. En attendant les prises dans le garage du pavillon pour recharger titine… Mais ça bouge : les Français tentent de développer la voiture électrique, mais curieusement la démarche vient de nouveaux entrants : ainsi Vincent Bolloré a présenté officiellement sa voiture électrique « Blue Car » qui dispose d'une batterie de haute technologie. Après avoir investi 70 millions d'euros pour sa conception, Vincent Bolloré a annoncé un investissement supplémentaire de 150 millions d'euros pour la production de son « véhicule propre » et de la production de la batterie « à hautes performances » Lithium Métal Polymères (LMP) de 30 kW. Lancement annoncé en 2007-2008. Le groupe Dassault a présenté son concept de véhicule électrique Cleanova basé sur une Kangoo.

Les voitures hybrides, où un moteur thermique (au pétrole, quoi !) complète et alimente des batteries commencent à percer, grâce notamment aux efforts des constructeurs japonais. Un peu chère, mais appréciée des stars (Léonardo DiCaprio roule en Prius), la voiture hybride consomme sensiblement moins qu’une voiture classique.

Le gaz.

Même s’il s’agit d’un hydrocarbure, le gaz produit beaucoup moins de rejets  nuisibles à l’environnement que l’essence ou le gasoil. Deux types de gaz sont utilisés pour faire avancer nos voitures.

-      Le GPL (gaz de pétrole liquéfié) est un mélange de butane et de propane. Même s’il progresse encore et malgré les incitations fiscales, le GPL pâtit de plusieurs inconvénients : faibles quantités produites (qui n’explique pas la rareté des pompes : 10% en France), surcoût à l’achat de la voiture, difficultés à l’entretien… Sans parler de la réputation de dangerosité, totalement surévaluée.

-      Le GNV (gaz naturel véhicule) est celui qui alimente vos cuisinières. En France, un tiers des nouveaux bus tourne au GNV, tout comme bon nombre de bennes à ordures. L’utiliser est encore compliqué pour un particulier, notamment pour des problèmes de stockage et d’approvisionnement. Toutefois, 3 millions de véhicules roulent au GNV dans le monde et des améliorations techniques pourraient faire augmenter ce chiffre.

L’hydrogène et pile à combustible.

L’hydrogène (H pour les chimistes) est la matière la plus courante sur notre terre, mais elle n’existe pas naturellement à l’état libre. Il faut donc de l’énergie primaire (du pétrole ou de l’atome) pour l’extraire. Mais, lorsque ce « détail », parmi d’autres, comme le transport et le stockage à bord, seront réglés, l’hydrogène sera promis à un brillant avenir pour le transport. D’ailleurs, des bus et même des voitures particulières, comme le Hummer du gouverneur de Californie, Schwarzenegger lui-même, roule à l’H.

L’hydrogène peut-être utilisé de deux manières pour faire rouler un véhicule.

-      Il peut brûler dans un moteur classique légèrement modifié, en se mélangeant avec l’oxygène. Il ne produit alors… que de l’eau ! Impeccable pour l’environnement, mais, techniquement, cette solution est hyper complexe pour des raisons d’encombrement, entre autres.

-      Les industriels s’orientent donc vers le couple hydrogène-pile à combustible (PAC). L’hydrogène, mélangé à l’air, alimente la PAC. Elle transforme l’énergie chimique en électricité, qui alimente un moteur rejetant de la vapeur d’eau. Le principe date de 1839 et est utilisé pour l’électricité des fusées. Mais, pour nos voitures qui sont beaucoup moins grosses qu’une fusée, il faudra sans doute attendre la mise au point d’un modèle encore plus sophistiqué de piles, dites à membranes échangeuses de protons (PEMFC). Vous comprendrez aisément que nous ne rentrions pas dans les détails de cette technologie prometteuse…. dans 20 ans au moins.

L’eau.

Beaucoup moins chère que le pétrole, l’eau serait le combustible idéal…Sauf que l’eau ne brûle pas. Toutefois, elle contient de l’hydrogène (voir plus haut) et peut jouer un autre rôle dans la motorisation que de refroidir les cylindres.

L’aquazole, développé par un pétrolier français, est un mélange gasoil-eau. En ajoutant 15% d’eau au gasoil, on diminue le prix au litre. Oui, mais comme la consommation augmente de 15% environ, ça ne change pas grand-chose.

Dans un autre genre, le moteur à eau Pantone (du nom de son mystérieux inventeur) fascine la presse. Il s’agit d’injecter de la vapeur d’eau chauffée par les gaz d’échappement pour faire baisser la consommation. Toutefois, en l’état actuel des études, les performances du procédé Pantone semblent être proches de zéro.

Tout ça pour dire que de l’eau peut couler sous les ponts avant qu’elle fasse avancer nos voitures.

Et tout le reste... pour conclure.

Bouse de vache, air comprimé ou énergie solaire, les « Géo Trouvetout » n’ont pas dit leur dernier mot. Partout dans le monde, d’audacieux inventeurs fomentent de nouvelles solutions pour faire avancer l’auto. Et ne soyons pas si moqueurs : la recherche a permis aux carburants d’aujourd’hui d’être beaucoup plus performants et beaucoup moins polluants que ceux des années 60. Et puis, il faudra bien, de gré ou de force, sortir un jour du tout pétrole.

À moyen terme, les voitures bioflex, ou flex-fuel en bon anglais, capables de digérer toutes les huiles, arriveront prochainement sur le marché. Et comme la loi de finances 2006 veut taxer les véhicules de société, et sans doute bientôt toutes les voitures, sur leur indice de pollution, c’est une bonne nouvelle. Y compris pour la planète que nous laisserons à nos enfants.

En attendant ce futur béni où les voitures ne pollueront plus, n’hésitez pas à marcher, à pédaler, ou à emprunter les transports en commun.

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